Ce printemps, quand le glas de la sciatique a sonné, quand ma chaussure s’est mise à butter sur les aspérités du chemin, quand cette petite brûlure en bas des reins m’a agacée et que j’ai décidé de poser mon sac, je pensais prendre une semaine ou deux de repos bien mérité.

Mais la fatigue qui avait enflammé mes muscles et mes tendons avait aussi coulé jusque derrière mes os pour s’infiltrer sans retenue jusqu’au creux du pli de l’âme. Une vraie inondation charriant son lot d’anxiété et de stress.

Je ne suis pas restée inactive pendant cette soudaine sédentarité.

J’ai cherché le pyromane qui sommeillait en moi puis je l’ai trépassé à tabac. J’ai fait barrage à des flots d’agressivité à tribord et j’ai lutté contre l’auto-sabordage à bobards. Comme le temps s’écoulait, j’ai eu maille à partir avec le Monde et j’ai dû ravaudé quelques chaussettes, raccommoder certains projets et biner mes plates-bandes.

Voilà, l’incendie est éteint depuis belle lurette et l’eau semble trouver (enfin) le chemin de la décrue. Mais où sont donc mes pompes ?
Parce qu’il va falloir chausser !

… c’est même un art simple. Simple et évident. Ne sommes-nous pas conçus, fabriqués et assemblés uniquement pour exceller dans cet exercice ? Mécaniquement je veux dire !

Parce que l’art de marcher, dans la tête c’est une autre histoire. Dès qu’on y rêve un peu, c’est un vrai foutoir ! Un enchevêtrement de démarches à mener hors du train train quotidien. Comme tout ce qui est simple, se mettre en marche est une affaire très complexe. Mentalement je veux dire !

Le chemin le plus caillouteux que doit parcourir le marcheur et celui de sa voie intérieure, il est parfois si mal balisé que l’on peut s’y perdre aussi facilement que dans une forêt balafrée par les forestiers ou pire encore, aussi  certainement que sur un sentier valaisan. Hors station bien entendu !

Bah oui, il faut alléger, décomplexifier, lâcher les proies et les ombres, vider les sacs. On dit que partir est une façon de se dépouiller du superflu, mais comment savoir de quoi se départir avant même d’être dans le flux?

Pour se faciliter la vie, quand on rentre, on fait une liste de ce sac devenu idéal au fil des pas dépassés. Parfois même on conserve et on range soigneusement, soit une trousse de toilette, soit quelques habits devenus fétiches soit encore quelques notes sur les envies de périples nées chemin faisant. On relève ici ou là des idées, collectionne des images ou acquiert le petit ustensile qui a peut être fait défaut la dernière fois.

Mais rien y fait. A chaque fois, il faut recommencer de puis le début. 

Commencer par jouïr de la sédentarité retrouvée, du confort douillet des choses et des gens qu’on aime. A trouver ça normal on finit par oublier qu’on est nomade et à force d’oubli on en tombe malade. On est empêtré, engoncé, fatigué, écoeuré. 

A ce moment précis le périple est déjà entamé. Mais on n’en sait rien. Tout l’être et même le paraître sont vides. Il n’y a plus rien à réchauffer. C’est la partie indicible de l’aventure.

Je trouve fou comme le langage n’a de mots que pour nous parler de ce que l’on sait déjà, comme les livres ne s’écrivent qu’avec des commencements qui nous sont familiers, comme toutes les histoires de marcheurs commencent pas à pas avec des itinéraires et finissent mot à mot toujours avec la même philosophie prétendant que le but n’est rien et que seul le chemin compte !

Si cela était vrai, alors il suffirait de se lever et d’aller.

Mes périples 2018 sont bientôt terminés, ils entrent dans leur dernière ligne droite : mettre un pied devant l’autre !

Le 15 avril je vais retrouver l’Aar de la marche au départ de Nidau sur les bords du Lac de Bienne pour rejoindre, Koblenz, là où cet art en jette, l’air de Rhin 😉

Puis le 8 mai, de là, je pense rallier Dielsdorf dans le canton de Zürich. J’aimerai rentrer avant l’été par les Crêtes du Jura. Aller jusqu’à Genève voir le jet d’eau (je n’ai jamais vu le jet d’eau!) puis s’il est possible de rêver encore un peu j’irai jusque chez moi dans la Plaine du Rhône (en passant par la France?)

Je n’oublie pas les marcheurs des vadrouilles qui pourront me rejoindre en chemin, ni même Laly et les randonneurs du dimanche avec deux dates prises sur mes retours sédentaires:

En juin, ou en septembre j’aimerai retourner voir le coucher de soleil au Napf…

Pour me rejoindre en chemin, contactez-moi. Je sais à peu près où je serai et à quelles dates … mais à peu près. Un petit échange de mail vaut mieux que mille agendas mal tenus 😉 

Deux façons de faire : vous avez une étape qui vous tape dans l’oeil et je vous avertis quand j’y serai ou vous avez des dates à disposition et je vous tiens au courant de mon avancée.

Toujours est-il que j’essaie quand même de tenir cette chose à jour : Le calendrier

Et si tu as lu tout ça, tout ça ! Il est temps de vider les placcards et de faire ton sac 😛 

En route !

Je hais la charité. Mais elle est nécessaire quand le système de solidarité craque.

La solidarité est laborieuse, elle est individuellement peu gratifiante et n’apporte aucune satisfaction immédiate. Elle laisse la dopamine du contibuable au repos. La solidarité se nourrit de taxes, de lois, de protocoles et de contrôles. Elle frustre celui qui la délivre, fâche par son effet contraignant celui qui la finance. Elle est rébarbative et quand elle manque sa cible, fait crier au scandale. Le seul gagnant semble être le récipiendaire qui se permet parfois le luxe de la critiquer.

La solidarité, définie par ce chapelet de gros mots est devenue elle-même un gros mot.

Pourtant la solidarité est un investissement rentable pour l’ensemble d’une communauté ou d’un système. Elle lui permet de fonctionner sans générer trop de scories. Elle met de l’huile dans les rouages, minimise l’humiliation du récipiendaire en fixant collectivement les critères de sa dispense afin d’en contrôler les dépenses. Elle s’assure aussi que personne ne passe entre les mailles du filet.

La solidarité, telle qu’elle a été conçue depuis la fin de la guerre avec l’apparition des assurances vieillesse et sociale ou des congés payés par exemple est quand même ce qu’on avait fait de mieux dans l’Histoire de l’humanité depuis pas mal de temps.
C’est elle qui a assuré cette fameuse « paix sociale » qui a valu à la Suisse sa grande prospérité.

C’est malheureusement une notion abstraite et complexe. Les esprits simplistes ont préférés écouter les sirènes des arrogants partis désireux de sauvegarder leurs intérêts particuliers au détriment de ceux du groupe. Léguant les problèmes collectifs à la responsabilité individuelle. Et ont peu à peu rejeté le concept de solidarité au profit de la charité.

La charité se fait un peu à la tête du client si j’ose dire. La personne doit paraître méritante ou sa pauvreté excusable selon des critères totalement aléatoires fixés au gré du donneur. C’est une valeur très soutenue par les donneurs de leçon car elle permet d’exclure toutes personnes ne se pliant pas au dogme en vigueur. La charité s’accorde comme une option, elle est facultative et valorisante pour qui la pratique ayant comme effet secondaire une certaine humiliation ressentie par le récipiendaire soumis au jugement de celui qui a réussi. Elle est d’une redoutable efficacité individuelle en stimulant la zone du plaisir mais s’avère relativement nulle au niveau de la cohésion d’un groupe ou d’une société fait d’hétérogénité et de différences. Au final elle aggrave la souffrance et diminue la performance collective. Pour retrouver sa compétitivité, le groupe peut émettre l’idée d’exterminer la différence sans manquer de cohérence.

Oui je hais la charité.

Malgré tout ça je la recommande au profit de l’indifférence si comme cet hivers une centaine d’individus doivent dormir à même le sol d’une capitale jusqu’alors connue pour sa tolérance.

Pour moi, marcher dans le froid c’est facile car je sais que vous êtes ici, dans le virtuel, à penser à moi parfois et que j’ai votre amitié au bout des doigts.

Marcher dans la neige c’est vivifiant parce que le soir venu je sais qu’un endroit chaud existe pour moi et que je n’ai pas à craindre la nuit. Au pire du pire j’oserais frapper à une porte pour demander l’hospitalité.
Je sais aussi que je peux monter dans n’importe quel train ou n’importe quel bus si d’aventure j’avais un problème.
Dans ma pochette de sac il y a quelques pièces alors si j’ai faim je peux toujours faire un saut à la Coop, à la Migros ou dans un kiosque pour trouver quelque chose à me mettre sous la dent.
Si mes chausses ou mes habits sont mouillés je sais qu’ils seront vite secs et si ma veste en plume laisse passer le froid je lui rajoute un coupe-vent.
Le long du Rhin un garde-frontière m’a regardé de travers mais je n’avais pas peur. Je suis Suisse, je suis blanche et je suis blonde (!) et dans ma fameuse pochette j’y range aussi mes papiers.
Je ne sais pas pourquoi c’est ainsi, je ne sais pas pourquoi moi.
Mais je sais que même si je doute et que même si je galère sur un chemin effacé par les congères, je sais que tout ça n’est que du bonheur!
Alors pour ça et pour tout le reste je dis merci.
Juste merci.

C’est peut être une chimère, mais je la suis.

Pour la suivre, il faut que je prenne du temps pour adapter mes moyens à son ampleur et comme l’oiseau fait son nid, petit à petit je défais le mien pour qu’il soit plus facile de m’envoler.

Je perfectionne le plan de 2015 qui consiste à louer mon appartement pour me contenter d’un logement plus modeste afin de poursuivre mon rêve. Que celui-ci ait encore des contours un peu flous ne devrait pas m’empêcher de le voir suffisamment brillant au bout de mon tunnel bientôt traversé.

Il y a encore beaucoup à faire pour que ce nid défait me permette de tisser d’or et d’argent de nouveaux sentiers mais il est des choses qui grandissent lentement et qu’il convient de laisser un pousser tranquillement.

En attendant que ces changements ne se concrétisent vraiment je vais profiter de la santé retrouvée pour faire quelques pas dans mon jardin et pour rejoindre de temps en temps le chemin des autres.

Vous trouverez sur mon Photoblog des vues faites dans les Alpes vaudoises et aux alentours. Comme je dois suivre les travaux (réels et conséquents) que j’ai entrepris dans ma maison je n’ai pas loisir de prévoir longtemps à l’avance ces escapades ni de vous y convier comme l’année passée. Mais il ne s’agit que de reculer pour mieux sauter. (Claude, c’est une image hein!) On se retrouvera donc certainement au printemps.

Ou alors avant, sur les bords du Rhin cet hiver, quand je tenterai de relier Coire à Bâle ou Bâle à Coire.

Dans l’immédiat, si tout va bien, j’essaie demain, au départ de Bex de rejoindre l’alpage de Javerne puis de redescendre sur Les Plans… Je dis j’essaie car il s’agit quand même d’un dénivelé positif de plus de 1200m sur moins de 7km ce qui rendra la pente… comment dire? Pentue! Et je me méfie de l’état du chemin, car ce n’est pas le sentier le plus priser pour monter à la Javerne… On verra bien.

Carte Suisemobile

Dimanche, comme plusieurs dimanches jusqu’à la fin de la saison, j’ai le plaisir de faire la gouvernante (si si ça fait mieux que la Conchita) au refuge Giaccomini à Anzeindaz. Si vous passez, demandez à me voir. Pas sûre que je puisse boire le café avec vous car le temps est compté et la tâche est immense mais cela me fera plaisir.

Et lundi je tente une nouvelle expérience pendant trois jours. C’est moi qui irai à la rencontre d’une personne en chemin, qui, partie du fin fond du Tessin rejoint gaillardement le Jura. Elle est actuellement dans la région bernoise et je me réjouis déjà des paysages à partager ici avec vous. J’espère en apprendre beaucoup à partager l’expérience d’une autre. Il est parfois des problèmes que l’on croit sans solution et qui se peuvent se résoudre peut être? Notamment pour moi celui des hébergements.

N’hésitez pas à me laisser un message, j’aimerai savoir comment je peux partager mes aventures pour que cela vous apporte quelque chose d’agréable dans votre journée.

Je me réjouis de partager à nouveau mes pas avec vous. En attendant je vous souhaite une belle fin d’été et un début d’automne lumineux.

La Madelon